[VALIDE] Bucéphale
Publié : mer. août 04, 2004 2:25 pm
Le réveil
Le noir…le silence…un bruit lointain.
*Du vent ?Oui, c’est bien ça, du vent…
Un vent soufflant par rafales…Puis plus rien… à nouveau du vent…un goût amer dans la bouche : du sang. Du sang et autre chose. On dirait… quelque chose de cuit…de la brique ou quelque chose du genre. De la terre calcinée? Non, un peu brûlée simplement. Qu’est-ce que du sang et de la terre brûlée font dans sa bouche ? Il faut qu’il ouvre les yeux.
*Ha, mes yeux !
Un rai de lumière éblouissant vient de l’aveugler mais la lumière s’estompe peu à peu. Il commence à comprendre ce qu’il voit : le ciel sur sa droite, de la terre sur sa gauche. C’est le ciel qui l’a ébloui. En fait, pour un ciel, il est plutôt sombre…des nuages gris et proches un peu partout. Où est-il ? Quel est ce lieu où terre et ciel sont renversés ? Il entend un bruit de pierre qui roule… Là voilà! Une pierre d’un gris sombre, un peu brûlée elle aussi. C’est vrai qu’il fait plutôt chaud ici.
*Un désert ?
Il vient de remarquer quelque chose d’insolite : la pierre monte, elle va de bas en haut et non vers la terre. « Quel lieu étrange… » se dit-il. Puis il comprend : ce n’est pas le monde qui est sens dessus dessous mais bien lui. Il est étendu sur le sol, c’est pour ça que la terre est sur sa gauche et le ciel sur sa droite…Mais la pierre ? Elle allait de bas en haut… Il sent que lui aussi est attiré vers le haut.
*Une pente.
Il est étendu sur une pente, la tête vers le bas. A peine a-t-il esquissé un mouvement qu’il sent la douleur présente dans tout son corps, dans chacun de ses nerfs. Autant ne pas se lever. En fait, la terre semble assez douce à son goût. Il pourrait fermer les yeux, se laisser aller pour ne plus sentir la douleur…il est tellement fatigué…
« Debout, humain ! » tonne la voix.
*Qu’est-ce que c’était que ça ? Ca a fait un boucan d’enfer… J’ ai dû rêver…
« Lève-toi ! ». Là, c’est indéniable, quelqu’un lui a parlé. Il rouvre les yeux. Personne. Il faut qu’il se dresse pour voir autour de lui. Il sent son bras droit. Ou plutôt, il sent la douleur de son bras droit. Il le déplace quand même pour pouvoir s’appuyer dessus. De toute façon, la voix ne le laissera pas retomber dans l’inconscience si douce. Il voit sa main droite éraflée, couverte de bleus et de crasse. Sur le dos de cette main, un mince filet de sang s’échappe d’une blessure à moitié cicatrisée. Apercevant des cailloux pointus jonchant le sol, il stoppe net sa main qui allait justement prendre appui sur ces cailloux. Il en sent d’ailleurs de nombreux dans son flanc et sous ses jambes. Finalement, s’évanouir ici ne lui semble pas une bonne idée…Ce n’est cependant que lorsqu’il se tourne sur son flanc gauche qu’il sent le mal effroyable qui lui ronge le bras gauche. Celui-là, c’est sûr, il est cassé. On peut oublier l’idée de se retourner sur le flanc gauche. Il va devoir s’appuyer sur le genou gauche pour se lever. La douleur est si forte dans son bras! Si seulement elle pouvait ne pas venir par élancements, il pourrait essayer de se contrôler.
Le lieu du réveil
Enfin à trois pattes. Son bras ballant lui semble une chose morte mais la douleur qu’il ressent lui affirme le contraire. Il tourne la tête. Toujours personne.
-Qui m'a parlé? Où êtes-vous?
Aucune réponse ne lui parvient.
*Où peut bien être la personne qui m’a parlé ? Etait-ce un homme ou une femme ? Une voix dans ma tête peut-être…
L’homme se met alors à observer le paysage qui l’entoure : une terre à moitié brûlée comme celle sur laquelle il marche s’étend à des centaines de mètres aux alentours. Au loin, en contrebas, il aperçoit quelques touffes d’herbe et, encore plus loin, des arbres et des étendues ressemblant à des champs jaunes et verts. Il aperçoit également une étendue d’eau à la limite de son champ de vision. Il ne sait si c’est un lac, une rivière ou une mer. Sa vue est trop floue pour ça. Il crache la terre et le sang qu’il a dans sa bouche. Une fois cela fait, un goût âpre se fait sentir dans sa bouche sèche. Un peu d’eau ne serait pas de refus… Comment a-t-il atterri ici ? Il ne sent souvient pas. Ce lieu semble être un volcan mais il n’en est pas sûr. Cette hypothèse pourrait quand même expliquer la visible fertilité des terres en contrebas.
Un contact un peu froid le tire de ses pensées. Un médaillon est suspendu à son cou par une chaînette. Il l’enlève et l’observe : c’est un métal ressemblant à de l’or ou du bronze mais sur lequel est gravé sur une face une tête ou un masque étrange avec deux pierres semi-précieuses aux reflets bizarres en guise d’yeux. Sur l’autre face, une tête d’animal : un bœuf à ce qu’il lui semble… D’où lui vient ce médaillon ? Aucun souvenir. Que représente-t-il ? Aucune idée non plus.
*Mais qu’est-ce que j’ai à ne pas me rappeler ?
L’homme réalise alors le vide qu’il y a dans sa mémoire : d’où vient-il, qui étaient ses parents, qu’est-ce qui l’a mis dans un état pareil, ce qu’il venait faire sur ce volcan, pourquoi conservait-il ce médaillon par-devers lui, a-t-il de la famille ? Toutes ces questions restent sans réponse. Il met ça sur le compte de la faiblesse physique. Il perçoit alors une sorte de vrombissement intermittent. Ca vient d’un endroit en amont de là où il se trouve. Il repasse le médaillon à son cou et, attiré par ce son étrange, il s’avance en clopinant vers son origine. Il découvre celle-ci derrière un tas de hauts rochers : c’est une grotte sombre d’où sortent des relents évoquant le renfermé, le brûlé et la terre. Cette grotte s’enfoncerait loin dans le volcan que ça ne l’étonnerait pas outre mesure… Le son provient également de cet endroit. Les hauts rochers font office de camouflage naturel à la grotte, la rendant invisible depuis les plaines en contre-bas. « Curiosité de la nature, probablement… » se dit-il.
La grotte
Il s’approche de l’ouverture mais s’arrête en apercevant une trace sur un des rochers jouxtant la grotte. Une trace mélangeant de la terre et du sang. Une trace en forme de main droite étalée. Non, une main droite qui s’est posée à cet endroit et qui a ensuite glissé vers…vers l’extérieur. Celui ou celle qui a posé sa main à cet endroit sortait de la grotte. Mû par un réflexe, il lève sa propre main droite et vient la juxtaposer à quelques centimètres au-dessus de la trace. Mêmes dimensions, même taille, c’est donc sa main. Cette terre est la même que celle qui recouvre sa main et ce sang est son sang. C’est lui qui est sorti de la grotte. Il faut qu’il sache ce qu’il allait faire dans pareil endroit. Pourquoi allait-il se réfugier dans une grotte alors qu’il était blessé ? Etait-il traqué ? Ou bien était-ce dans la grotte qu’il a été blessé ? C’est décidé, il va rentrer dans la grotte, il veut savoir.
« Humain, le moment n’est pas venu pour toi ! ». Il sursaute. Impossible de dire si cette voix venait de l’intérieur de lui ou de tout autour de lui. Comment une voix peut-elle être aussi forte et puissante ? Il doit être en train de devenir fou. Ca doit être ça, il entend des voix issues de son imagination! Il se fige alors et écoute… Silence et calme. Non, il est sain d’esprit…
*Aucun être humain ne pourrait avoir pareille voix. Mais qu’était-ce alors ? De toute façon, mieux vaut obéir. Un être doué d’une telle voix doit être bien puissant et un mortel affaibli tel que moi ne pourrait rien faire. Peut-être même est-ce cette créature qui m’a mis dans un état pareil…
Marchant doucement à reculons, il observe l’entrée de la grotte. Une fois les rochers mis entre la grotte et lui, l’homme se retourne et descend lentement la pente de terre brûlée du volcan. « Partir, partir de cet endroit, vite et loin. » est sa dernière pensée avant que la peu ne le submerge et qu’il quitte ce lieu sinistre aussi vite que son corps affaibli le lui permet.
La convalescence
L’homme mit alors toute la journée pour redescendre la pente du volcan. Trébuchant souvent, tombant parfois, il souffrit les mille maux de son corps meurtri avant d’arriver à la tombée de la nuit dans le village de paysans qu’il avait aperçu auparavant. Il y fût soigné, son bras cassé put se remettre et il reprit petit à petit suffisamment de forces pour faire partie des hommes vigoureux du village. En échange des soins attentifs des villageois, il aida aux travaux des champs et aux tâches rudes que la vie rurale impose. Ce payement de sa dette dura un peu moins d’une année. C’est à cette époque qu’il comprit être frappé d’amnésie, ne sachant répondre aux nombreuses questions que lui posèrent les paysans sur sa vie passée. Un nom lui fût alors attribué avec son accord : Bucéphale (tête de bœuf). Etant donné que son seul bien était son médaillon représentant une tête de bœuf et quelques guenilles ne fournissant aucun indice sur son identité passée, son seul lien avec le passé était cette tête de bœuf qui devint son nom. Les habitants de la région suspectaient la grotte qu’avait vu Bucéphale d’être une entrée des Enfers et, comme tous ceux qui y étaient rentrés n’en étaient pas revenus à l’exception de Bucéphale, les paysans locaux le considérèrent comme envoyé par Hadès et protégé
par lui.
L’errance
En tant qu’envoyé d’Hadès, Bucéphale créait un malaise parmi ses hôtes et c’est avec un peu de soulagement que les habitants apprirent son départ. Bucéphale, devant la vie au dieu Hadès, lui jura fidélité pour le don de sa vie et partit alors pour essayer de retrouver son passé, sa famille, pour trouver des réponses. Il se doutait bien cependant ne pas être un envoyé d’Hadès contrairement aux naïfs paysans du village car un envoyé d’un dieu quel qu’il soit ne commence pas son périple en étant à moitié mort et amnésique. Il se considérait en fait comme un « épargné d’Hadès » bien qu’il ne sache pas pourquoi lui en particulier avait été épargné. Ses interrogations et ses doutes ne faisaient qu’accroître sa curiosité envers les faits qui avaient précédé son inconscience. Tourmenté par cette quête personnelle d’identité, il se mit à errer de par le monde, le plus souvent en solitaire. L’ « épargné d’Hadès »se mit à attaquer alors les quelques serviteurs des autres dieux qu’il rencontra sur sa route. Il se fortifia quelque peu par ces combats, par la méditation solitaire dans les plaines et les steppes et en faisant face aux climats rudes de certaines régions. Après quelques semaines d’errance, il se décida à se rendre au temple d’Hadès pour lui prêter un serment officiel de fidélité et d’allégeance et faire partie de son clan, afin de le servir de son mieux.
Le noir…le silence…un bruit lointain.
*Du vent ?Oui, c’est bien ça, du vent…
Un vent soufflant par rafales…Puis plus rien… à nouveau du vent…un goût amer dans la bouche : du sang. Du sang et autre chose. On dirait… quelque chose de cuit…de la brique ou quelque chose du genre. De la terre calcinée? Non, un peu brûlée simplement. Qu’est-ce que du sang et de la terre brûlée font dans sa bouche ? Il faut qu’il ouvre les yeux.
*Ha, mes yeux !
Un rai de lumière éblouissant vient de l’aveugler mais la lumière s’estompe peu à peu. Il commence à comprendre ce qu’il voit : le ciel sur sa droite, de la terre sur sa gauche. C’est le ciel qui l’a ébloui. En fait, pour un ciel, il est plutôt sombre…des nuages gris et proches un peu partout. Où est-il ? Quel est ce lieu où terre et ciel sont renversés ? Il entend un bruit de pierre qui roule… Là voilà! Une pierre d’un gris sombre, un peu brûlée elle aussi. C’est vrai qu’il fait plutôt chaud ici.
*Un désert ?
Il vient de remarquer quelque chose d’insolite : la pierre monte, elle va de bas en haut et non vers la terre. « Quel lieu étrange… » se dit-il. Puis il comprend : ce n’est pas le monde qui est sens dessus dessous mais bien lui. Il est étendu sur le sol, c’est pour ça que la terre est sur sa gauche et le ciel sur sa droite…Mais la pierre ? Elle allait de bas en haut… Il sent que lui aussi est attiré vers le haut.
*Une pente.
Il est étendu sur une pente, la tête vers le bas. A peine a-t-il esquissé un mouvement qu’il sent la douleur présente dans tout son corps, dans chacun de ses nerfs. Autant ne pas se lever. En fait, la terre semble assez douce à son goût. Il pourrait fermer les yeux, se laisser aller pour ne plus sentir la douleur…il est tellement fatigué…
« Debout, humain ! » tonne la voix.
*Qu’est-ce que c’était que ça ? Ca a fait un boucan d’enfer… J’ ai dû rêver…
« Lève-toi ! ». Là, c’est indéniable, quelqu’un lui a parlé. Il rouvre les yeux. Personne. Il faut qu’il se dresse pour voir autour de lui. Il sent son bras droit. Ou plutôt, il sent la douleur de son bras droit. Il le déplace quand même pour pouvoir s’appuyer dessus. De toute façon, la voix ne le laissera pas retomber dans l’inconscience si douce. Il voit sa main droite éraflée, couverte de bleus et de crasse. Sur le dos de cette main, un mince filet de sang s’échappe d’une blessure à moitié cicatrisée. Apercevant des cailloux pointus jonchant le sol, il stoppe net sa main qui allait justement prendre appui sur ces cailloux. Il en sent d’ailleurs de nombreux dans son flanc et sous ses jambes. Finalement, s’évanouir ici ne lui semble pas une bonne idée…Ce n’est cependant que lorsqu’il se tourne sur son flanc gauche qu’il sent le mal effroyable qui lui ronge le bras gauche. Celui-là, c’est sûr, il est cassé. On peut oublier l’idée de se retourner sur le flanc gauche. Il va devoir s’appuyer sur le genou gauche pour se lever. La douleur est si forte dans son bras! Si seulement elle pouvait ne pas venir par élancements, il pourrait essayer de se contrôler.
Le lieu du réveil
Enfin à trois pattes. Son bras ballant lui semble une chose morte mais la douleur qu’il ressent lui affirme le contraire. Il tourne la tête. Toujours personne.
-Qui m'a parlé? Où êtes-vous?
Aucune réponse ne lui parvient.
*Où peut bien être la personne qui m’a parlé ? Etait-ce un homme ou une femme ? Une voix dans ma tête peut-être…
L’homme se met alors à observer le paysage qui l’entoure : une terre à moitié brûlée comme celle sur laquelle il marche s’étend à des centaines de mètres aux alentours. Au loin, en contrebas, il aperçoit quelques touffes d’herbe et, encore plus loin, des arbres et des étendues ressemblant à des champs jaunes et verts. Il aperçoit également une étendue d’eau à la limite de son champ de vision. Il ne sait si c’est un lac, une rivière ou une mer. Sa vue est trop floue pour ça. Il crache la terre et le sang qu’il a dans sa bouche. Une fois cela fait, un goût âpre se fait sentir dans sa bouche sèche. Un peu d’eau ne serait pas de refus… Comment a-t-il atterri ici ? Il ne sent souvient pas. Ce lieu semble être un volcan mais il n’en est pas sûr. Cette hypothèse pourrait quand même expliquer la visible fertilité des terres en contrebas.
Un contact un peu froid le tire de ses pensées. Un médaillon est suspendu à son cou par une chaînette. Il l’enlève et l’observe : c’est un métal ressemblant à de l’or ou du bronze mais sur lequel est gravé sur une face une tête ou un masque étrange avec deux pierres semi-précieuses aux reflets bizarres en guise d’yeux. Sur l’autre face, une tête d’animal : un bœuf à ce qu’il lui semble… D’où lui vient ce médaillon ? Aucun souvenir. Que représente-t-il ? Aucune idée non plus.
*Mais qu’est-ce que j’ai à ne pas me rappeler ?
L’homme réalise alors le vide qu’il y a dans sa mémoire : d’où vient-il, qui étaient ses parents, qu’est-ce qui l’a mis dans un état pareil, ce qu’il venait faire sur ce volcan, pourquoi conservait-il ce médaillon par-devers lui, a-t-il de la famille ? Toutes ces questions restent sans réponse. Il met ça sur le compte de la faiblesse physique. Il perçoit alors une sorte de vrombissement intermittent. Ca vient d’un endroit en amont de là où il se trouve. Il repasse le médaillon à son cou et, attiré par ce son étrange, il s’avance en clopinant vers son origine. Il découvre celle-ci derrière un tas de hauts rochers : c’est une grotte sombre d’où sortent des relents évoquant le renfermé, le brûlé et la terre. Cette grotte s’enfoncerait loin dans le volcan que ça ne l’étonnerait pas outre mesure… Le son provient également de cet endroit. Les hauts rochers font office de camouflage naturel à la grotte, la rendant invisible depuis les plaines en contre-bas. « Curiosité de la nature, probablement… » se dit-il.
La grotte
Il s’approche de l’ouverture mais s’arrête en apercevant une trace sur un des rochers jouxtant la grotte. Une trace mélangeant de la terre et du sang. Une trace en forme de main droite étalée. Non, une main droite qui s’est posée à cet endroit et qui a ensuite glissé vers…vers l’extérieur. Celui ou celle qui a posé sa main à cet endroit sortait de la grotte. Mû par un réflexe, il lève sa propre main droite et vient la juxtaposer à quelques centimètres au-dessus de la trace. Mêmes dimensions, même taille, c’est donc sa main. Cette terre est la même que celle qui recouvre sa main et ce sang est son sang. C’est lui qui est sorti de la grotte. Il faut qu’il sache ce qu’il allait faire dans pareil endroit. Pourquoi allait-il se réfugier dans une grotte alors qu’il était blessé ? Etait-il traqué ? Ou bien était-ce dans la grotte qu’il a été blessé ? C’est décidé, il va rentrer dans la grotte, il veut savoir.
« Humain, le moment n’est pas venu pour toi ! ». Il sursaute. Impossible de dire si cette voix venait de l’intérieur de lui ou de tout autour de lui. Comment une voix peut-elle être aussi forte et puissante ? Il doit être en train de devenir fou. Ca doit être ça, il entend des voix issues de son imagination! Il se fige alors et écoute… Silence et calme. Non, il est sain d’esprit…
*Aucun être humain ne pourrait avoir pareille voix. Mais qu’était-ce alors ? De toute façon, mieux vaut obéir. Un être doué d’une telle voix doit être bien puissant et un mortel affaibli tel que moi ne pourrait rien faire. Peut-être même est-ce cette créature qui m’a mis dans un état pareil…
Marchant doucement à reculons, il observe l’entrée de la grotte. Une fois les rochers mis entre la grotte et lui, l’homme se retourne et descend lentement la pente de terre brûlée du volcan. « Partir, partir de cet endroit, vite et loin. » est sa dernière pensée avant que la peu ne le submerge et qu’il quitte ce lieu sinistre aussi vite que son corps affaibli le lui permet.
La convalescence
L’homme mit alors toute la journée pour redescendre la pente du volcan. Trébuchant souvent, tombant parfois, il souffrit les mille maux de son corps meurtri avant d’arriver à la tombée de la nuit dans le village de paysans qu’il avait aperçu auparavant. Il y fût soigné, son bras cassé put se remettre et il reprit petit à petit suffisamment de forces pour faire partie des hommes vigoureux du village. En échange des soins attentifs des villageois, il aida aux travaux des champs et aux tâches rudes que la vie rurale impose. Ce payement de sa dette dura un peu moins d’une année. C’est à cette époque qu’il comprit être frappé d’amnésie, ne sachant répondre aux nombreuses questions que lui posèrent les paysans sur sa vie passée. Un nom lui fût alors attribué avec son accord : Bucéphale (tête de bœuf). Etant donné que son seul bien était son médaillon représentant une tête de bœuf et quelques guenilles ne fournissant aucun indice sur son identité passée, son seul lien avec le passé était cette tête de bœuf qui devint son nom. Les habitants de la région suspectaient la grotte qu’avait vu Bucéphale d’être une entrée des Enfers et, comme tous ceux qui y étaient rentrés n’en étaient pas revenus à l’exception de Bucéphale, les paysans locaux le considérèrent comme envoyé par Hadès et protégé
par lui.
L’errance
En tant qu’envoyé d’Hadès, Bucéphale créait un malaise parmi ses hôtes et c’est avec un peu de soulagement que les habitants apprirent son départ. Bucéphale, devant la vie au dieu Hadès, lui jura fidélité pour le don de sa vie et partit alors pour essayer de retrouver son passé, sa famille, pour trouver des réponses. Il se doutait bien cependant ne pas être un envoyé d’Hadès contrairement aux naïfs paysans du village car un envoyé d’un dieu quel qu’il soit ne commence pas son périple en étant à moitié mort et amnésique. Il se considérait en fait comme un « épargné d’Hadès » bien qu’il ne sache pas pourquoi lui en particulier avait été épargné. Ses interrogations et ses doutes ne faisaient qu’accroître sa curiosité envers les faits qui avaient précédé son inconscience. Tourmenté par cette quête personnelle d’identité, il se mit à errer de par le monde, le plus souvent en solitaire. L’ « épargné d’Hadès »se mit à attaquer alors les quelques serviteurs des autres dieux qu’il rencontra sur sa route. Il se fortifia quelque peu par ces combats, par la méditation solitaire dans les plaines et les steppes et en faisant face aux climats rudes de certaines régions. Après quelques semaines d’errance, il se décida à se rendre au temple d’Hadès pour lui prêter un serment officiel de fidélité et d’allégeance et faire partie de son clan, afin de le servir de son mieux.